&Une nuit. Un désir. Quelques instants. Un souvenir. Une vérité.
# Sïana.

vendredi 22 mai 2020

verbiage

Crocs percutés. Froides tentacules, visions agréables. J'ai perdu foi. J'ai perdu foi en un espoir invisible, arrachant, pernicieux. Ventre rempli par l'enfer. Cœur laissé à la mère. La recherche ne m'apporte que volupté, égards, pertes et magie. A coups de phrases indirectes, je déglutis lentement mon mirage. Frôlant les herbes courtes, mon corps se révèle insensible. D'une violence chérie, je deviens le héros idéal. Un parachute peut-être ? Evoquez les déceptions, les méprises, les erreurs, les remords. Présentez sur la table vos péchés, ils seront pardonnés au moment même où ils seront partagés. Pourtant, il y a bien une chose dont je ne sais quoi faire. C'est de ce moi. De ce moi tempérant, divaguant, profondément têtu. Vous connaissez aussi cette histoire. Racontée maintes fois, elle est des plus banales. Piètre courage et refus de responsabilité me diriez-vous que de questionner le pouvoir de mon libre-arbitre dans ma relation d'entre-soi. Car oui, nous sommes au moins deux. Un seul moi, il est peut-être vrai selon l'angle que vous suivez. Deux si le moi est une rencontre consciente et inconsciente, de volonté et de désirs, de corps et d'esprit. L'unicité m'apparaît moins dans leur rapport que dans leur devoir de réunion. Je suis gâté m'a-t-on encore dit. Ce on qui se confond avec un moi qui cherche son sens, sa résistance, Mais ouvrez donc un livre de philosophie! Penchez vous donc sur un livre de psychologie. Oui mais que fais-je alors de ce dont j'essaye de te conter ? Assomme moi de tes concepts, de tes explications, de tes démonstrations. Profondément spiritualiste, matérialiste, mécaniste ou bien idéaliste, qu'en fais-je de ce moi que je dois me coltiner à chaque instant ? Ouvrez donc un livre de développement personnel, de spiritualité, que sais-je ! Cherchez donc dans des livres agréables qui proposent des exercices pratiques. Insatisfait. Vous n'avez donc pas assez essayé, vous entretenez seulement une relation narcissique avec vous-mêmes. Vous aimez votre ego, vous le nourrissez, vous le grossissez. Mais voyons, je ne parle toujours pas de cela. Une thérapie : va donc soigner tes émotions ! Laisse les remonter, laisse les vivre dit-on et là encore, tu te verras soulager. Mais que dis-je. Certainement que tu manques encore de patience, que tu n'as pas assez attendu. Je ne parle pas toujours pas de cela. Ah alors tu évoques peut-être cette expérience proprement humaine que tu garnis à tout va de visions et de fondations proprement métaphysiques et obscures. Tu cherches une réponse en dehors des livres, en dehors des concepts et de l'analyse et pourtant tes questions le sont proprement. Mais je ne peux m'exprimer que par des mots et l'expression, d'autant plus quand elle cherche à s'atteindre, nécessite a minima une réflexion nourrie par l'analyse. Dois-je alors me résoudre à me taire ? A cultiver une compréhension au-delà du langage, au-delà de la parole, au-delà même de la pensée ? Difficulté de rencontrer l'évidence. Difficile encore de distinguer la valeur et la vérité de mes motifs et mes inclinations quand les choix et explications sont multiples. Et ne me dis pas que "moi seul sait", non. Je te dis justement que même mon moi ne le sait pas. Il sait mais tu t'entraînes toujours à le faire douter. Ne me réduis pas encore à l'adage socratique ou montaignien ! Peut-être est-ce encore qu'une simple révolution égotique tardive. Une quête d'identité me proposeras-tu, une volonté de l'assouvir.

A table.


Je croyais pourtant évoquer cette chose qui échappe à tous tes concepts. Me diras-tu encore que je dois vivre. Que je devrais peut-être, il est vrai, commencer à vivre. La pensée et l'action devaient pourtant faire bon ménage. C'est du moins ce que j'ai entendu, ce que l'on m'a conté, ce que j'ai cru et ce que j'ai répété. Alors bien sûr, tu ne me dis pas non plus de mettre de côté cette relation indispensable. Un recours à bon escient. Mais tu ne me parlais pas de cela. Je mélange tout. Tu m'expliques plutôt que je dois cesser de me regarder vivre, de découper la réalité et de les réduire à ce qu'ils sont. De ne pas retirer ce mirage permanent que la nature nous a donné. Mais que dois-je faire. Puis-je te dire que je suis déçu ou jugerais-tu encore cela profondément égotique. Sapere aude! Comment donc ? Je crois pourtant toujours penser à travers quelqu'un. On me demande une chose et ce que l'on attend est la réponse d'un autre. Esprit encore trop jeune qui a besoin d'apprendre la docilité. Voyons, je ne suis pas réducteur. Je me joue des raccourcis et des incomplétudes, cela est peut-être vrai. La conformité de l'esprit, non pas tant dans son contenu que dans sa méthode, est-elle profondément nécessaire ? Mais où est alors la liberté ? C'est un peu ambitieux, je te l'accorde. Je ne te parle pas d'un libre-arbitre tant dans mes actions que dans ma pensée. Je te parle d'une liberté de l'esprit par l'esprit lui-même.


Au lit.

Féminin, masculin.

Anaïs

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